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Arrêt CJUE du 15 novembre 2022 : Bonne nouvelle pour les divorces internationaux ?

Le divorce par acte sous seing privé contresigné par avocat, encore appelé divorce par consentement mutuel ou divorce contractuel, connaît un essor important en France lié tant à l’allongement des délais judiciaires qu’à la simplification au moins apparente de ce mode de divorce.

En effet, jusqu’en 2014, le divorce par consentement mutuel nécessitait une homologation judiciaire valant ainsi décision de justice tant sur le principe, les conséquences du divorce entre époux comme à l’égard des enfants.

Depuis 2014, les avocats rédigent une convention de divorce déposée au rang des minutes des notaires lesquels contrôlent la régularité formelle de l’acte ainsi rédigé par les avocats.

Des difficultés sont cependant alors apparues dans un contexte d’internationalisation du mariage (et donc des divorces) tenant soit à la nationalité d’un des époux soit à leur lieu de mariage ou/et de vie post mariage quant à la reconnaissance de ce mode de rupture à l’étranger.

Hors Europe, les pays ne connaissent pas cette forme de rupture du lien conjugal de sorte que la prudence a conduit la grande majorité des avocats a refusé de rédiger des divorces par consentement mutuel en présence d’un élément d’extranéité.

En effet, le risque est qu’un divorce prononcé en France ne soit pas valable ou/et reconnu à l’étranger ; contraignant ainsi tout divorçant à faire une seconde procédure dans son pays d’origine ou de sa nationalité.

À l’intérieur de l’Union européenne, la question se pose aussi de la reconnaissance de cette forme de rupture du lien conjugal.

En effet, le règlement Bruxelles II bis prévoit une reconnaissance des décisions, y compris de divorce, automatique dans tous les États membres.

Mais qu’en est-il d’un accord régularisé entre époux dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel ? S’agit-il d’une décision immédiatement applicable ?

L’Arrêt de la CJUE du 15 novembre 2022 vient apporter un nouvel éclairage sur la notion de décision au sens de Bruxelles II bis puis Bruxelles II Ter depuis août 2022.

Elle juge ainsi que le règlement Bruxelles II bis vise toute décision de divorce, indépendamment du fait qu’elle ait été rendue lors d’une procédure judiciaire ou extrajudiciaire, si le droit national octroie aux autorités extrajudiciaires des compétences en matière de divorce.

Le cas échéant, une décision rendue par ces autorités extrajudiciaires doit être reconnue immédiatement, conformément au règlement.

Ainsi il résulte de la jurisprudence de la Cour que le règlement européen ne couvre que les divorces prononcés soit par une juridiction étatique soit par une autorité publique ou sous son contrôle ; ce qui exclut les simples divorcés privés tels que celui résultant d’une déclaration unilatérale d’un des époux devant un tribunal religieux.

La Cour ajoute cependant que, lors de divorces prononcés par une autorité publique, et en particulier pour les divorces par consentement mutuel, l’autorité publique doit effectuer un examen des conditions du divorce au regard du droit national ainsi que de la réalité et de la validité du consentement des époux à divorcer.

Cet examen est nécessaire car il permet de distinguer la notion de « décision » des notions d’« acte authentique » ou d’« accord entre parties ».

Dans le cas soumis à la cour d’un divorce entre une italienne (pays qui connait le divorce extra judiciaire pardevant l’officier d’état civil) et un allemand (qui ne connait pas cette forme de divorce), la Cour estime que l’officier d’état civil est compétent pour prononcer le divorce de manière juridiquement contraignante, après que l’examen a été effectué.

Elle relève que l’officier a vérifié le caractère valable, libre et éclairé du consentement des époux à divorcer ainsi que le contenu de l’accord

Qu’en sera-t-il pour les divorces par acte sous seing privé contresigné par avocat ?

D’aucuns considèrent que cette jurisprudence ouvre la voie sans limite à la reconnaissance automatique des divorces par consentement mutuel au sein des pays de l’Union européenne.

D’autres considèrent à l’inverse qu’en droit français, aucune autorité publique n’effectue un examen des conditions du divorce, le consentement éclairé étant recueilli par l’avocat, le notaire ne vérifiant que la régularité formelle de l’acte contresigné par avocat et l’officier d’état civil ne procédant qu’à sa transcription

Bonne nouvelle pour les divorces par consentements mutuels français internationaux?

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