Les propriétaires bailleurs disposent désormais de moyens juridiques renforcés pour se prémunir contre les impayés et récupérer leur logement. Cependant, ces nouveaux droits s’accompagnent d’une exigence accrue de respect des règles procédurales, de qualité du logement et de gestion proactive.
Un bail bien rédigé et une relation claire avec le locataire sont les clés pour sécuriser son investissement locatif en 2025.
La clause résolutoire : un levier essentiel en cas d’impayé
Le bailleur doit insérer dans le contrat de bail une clause résolutoire qui autorise la résiliation automatique du bail en cas de non-paiement des loyers.
Concrètement, après signification d’un commandement de payer visant cette clause, le bail est automatiquement résilié après l’expiration d’un délai de six semaines si le locataire n’a pas régularisé sa dette.
⚠️ Le nouveau délai de 6 semaines pour le locataire après un commandement de payer pour régler sa dette, avant que la clause de résiliation de plein droit ne produise effet, ne s’applique qu’aux nouveaux baux conclus après l’entrée en vigueur de la loi du 27 juillet 2023, les baux en cours restant soumis à l’ancien délai de 2 mois.
En outre, si le bail comporte un garant solidaire, le commissaire de justice signifiera également le commandement à cette personne pour faire jouer sa garantie.
Si le locataire paye dans le délai imparti, la procédure prend fin et il peut rester dans les lieux.
En revanche, si le bail ne comporte pas de clause résolutoire, la résiliation ne se fait pas « automatiquement ». Dans ce cas, une solution existe néanmoins puisque le bailleur pourra saisir le juge des contentieux de la protection, qui appréciera la situation au cas par cas et qui pourra prononcer la résiliation du bail.
Le commandement de payer : étape préalable indispensable
Le commandement de payer est un acte officiel notifié par un commissaire de justice au locataire.
C’est le préalable obligatoire à toute procédure d’expulsion.
Il doit viser les loyers et charges impayés (au moins un mois de dette) et viser la clause résolutoire si le bail en contient une.
Ce document doit détailler le montant dû, mentionner le délai imparti pour payer (deux mois ou 6 semaines) et avertir le locataire qu’en cas de défaut de paiement le bailleur pourra demander au juge la résiliation du bail et l’expulsion.
Le bailleur ne doit pas tarder à faire délivrer le commandement dès le premier mois d’impayé car plus le retard s’accumule, plus la dette grossit.
En pratique, un commissaire de justice peut intervenir dès le premier mois de retard de paiement.
Recours judiciaire : assignation et jugement
Si le locataire ne paie pas après le commandement, le bailleur doit saisir le Juge des contentieux de la protection pour faire constater la résiliation du bail et obtenir l’expulsion.
L’avocat du bailleur fait alors signifier une assignation au locataire et, le cas échéant, à son garant solidaire.
Cette assignation fixe une date d’audience et présente la demande de recouvrement des arriérés de loyer ainsi que la demande d’expulsion du locataire.
Lors de l’audience, le juge des contentieux de la protection vérifie le calcul des impayés.
Si le bail incluait une clause résolutoire, le juge doit constater cette résolution.
Si le bail n’en incluait pas, le juge peut prononcer la résolution du contrat de bail, en fonction des manquements constatés du locataire.
Le juge peut accorder des délais de paiement au locataire en tenant compte de sa situation.
Le bailleur peut demander au juge la condamnation au paiement des loyers dus et la libération du logement.
S’agissant des délais de procédure, l’audience se tient au minimum six semaines après la signification de l’assignation.
Le jugement est ensuite rendu, en pratique, dans un délai de deux mois après l’audience de plaidoirie, en fonction de la charge de travail des tribunaux.
Après l’obtention du jugement, si le juge condamne le locataire à payer les dettes et à quitter les lieux, un commandement de quitter les lieux est signifié au locataire.
Le locataire devient alors « occupant sans droit ni titre » et dispose de deux mois pour libérer les lieux.
S’il ne quitte pas les lieux de son plein gré, le bailleur peut demander au commissaire de justice de procéder à l’expulsion, hors trêve hivernale.
En effet, pendant la période de trêve hivernale, du 1er novembre au 31 mars inclus, aucune expulsion locative ne peut être réalisée.
Toutefois, le bailleur peut engager la procédure (commandements, assignation, jugement) tout au long de l’année ; seule l’exécution matérielle de l’expulsion est interdite pendant la trêve.
Si le locataire persiste à occuper les lieux après le délai de deux mois suivant le commandement de quitter les lieux, le commissaire de justice peut ainsi demander au préfet le recours de la force publique pour procéder à l’expulsion.
Réforme 2025 : saisie des salaires déjudiciarisée et limites
La loi d’orientation du 20 novembre 2023 (décret d’application 2025-125) introduit, à compter du 1er juillet 2025, une procédure accélérée de saisie des rémunérations.
La principale nouveauté de cette réforme réside dans la disparition de l’intervention du juge dans la procédure de saisie sur salaire.
Concrètement, une fois le titre exécutoire obtenu (jugement ou bail notarié), le propriétaire ou son avocat peut directement saisir un commissaire de justice qui prend en charge l’intégralité de la démarche, sans passer par le juge de l’exécution.
Le commissaire signifie un commandement de payer au locataire.
Si le locataire reste défaillant après un mois, un commissaire répartiteur est désigné et le bailleur fait signifier à l’employeur du locataire un procès-verbal de saisie sur salaire. L’employeur prélèvera alors, dans le respect du montant insaisissable, une part de la rémunération du locataire pour solder sa dette locative. Cette réforme, qui confie la saisie au commissaire sous le contrôle du juge de l’exécution, vise à fluidifier le recouvrement et à éviter la phase judiciaire préalable normalement nécessaire pour lancer une saisie sur salaire.
Cette réforme représente une avancée significative pour les bailleurs, particuliers comme professionnels.
Elle vient répondre à une problématique persistante : la difficulté de recouvrer rapidement les loyers impayés tout en maintenant une relation équilibrée avec le locataire.
La procédure est plus rapide pour récupérer les sommes dues. Elle peut être particulièrement utile si l’on dispose d’un bail authentique (notarié) donnant directement un titre exécutoire.
Toutefois, cette nouveauté ne dispense pas le bailleur de l’étape judiciaire fondamentale pour obtenir un titre exécutoire, en l’absence de bail notarié.
Cette procédure ne porte que sur la récupération de sommes (loyers) et ne prononce pas la résiliation du bail ni l’expulsion.
Checklist pratique pour les bailleurs
- Avant de louer
- Rédiger un bail écrit avec clause résolutoire conforme à la loi (désormais clause résolutoire de 6 semaines et non plus 2 mois).
- Vérifier la conformité du logement (surface, sécurité, DPE ≥ classe E).
- Réaliser les diagnostics obligatoires (DPE, plomb, électricité, etc.).
- Prévoir une garantie loyers impayés (GLI) ou une caution sérieuse.
- Pendant la location
- Envoyer les quittances de loyer chaque mois.
- Surveiller les impayés et agir dès le premier retard (lettre de relance, mise en demeure).
- En cas d’impayé prolongé : délivrer un commandement de payer par commissaire de justice visant la clause résolutoire.
- Envisager la saisie sur salaire après 6 semaines, si impayé non contesté.
- En cas de dégradation ou troubles de jouissance paisible du bien : documenter et notifier par écrit.
- En cas de litige / expulsion
- Agir vite : saisir, par l’intermédiaire d’un avocat, le juge si nécessaire pour constater la résiliation du bail et anticiper la trêve hivernale.
Pour en savoir plus
Pour toute question relative à vos droits en tant que propriétaire bailleur, le Pôle Immobilier du cabinet KOVALEX est à votre disposition pour vous accompagner efficacement dans ce type de dossier.